L'histoire du Mans dans l'antiquité
Chronologie de la cité gallo-romaine
4000 ans avant J.C. une peuplade préhistorique vivait sur la colline de
la future cité gallo-romaine : Vindunum.
En 52 avant J.C., La cité du Mans fut un des foyers de soldats nécessaires
à la libération
d'Alésia
par l'armée de secours. D'après César, 5000
soldats Cénomans participèrent à l'expédition.
En 21 avant J.C., sous le règne d'Auguste,
la cité Vindunum (Le Mans) devint la capitale des Cénomans.
En 12 après J.C. les habitants de cette cité participèrent à la dédicace de
l'Autel des trois Gaules à Lyon. C'est cette même année que fut construit
le temple de Mars Mullos à Allonnes. En 14, sous le règne de
Tibère,
on construisit le sanctuaire de la tour aux Fées à Sablé. En 21 après J.C.,
les peuples de l'Ouest, parmi lesquels celui du Mans, participèrent aux
révoltes de Florus et de Sacrovir. En 50, des thermes firent leur aparition
au Mans. De 69 à 96 furent construits la villa de Noyen ainsi que le théâtre
d'Aubigné-Racan. En 161, la crise économique et sociale frappa la cité du
Mans. De 260 à 274, des ateliers locaux émettaient de la fausse monnaie.
Deux ans plus tard les Francs et les Alamans envahirent la cité.
Entre 284 et 305, la muraille du Mans fut édifiée pour faire face aux
différents dangers. Cependant, en 287, des colons barbares s'installèrent
au Mans. En 313, le christianisme fut déclaré comme religion officielle. Ce
n'est qu'en 395 qu'il deviendra vraiment pratiqué. Enfin, en 510, la cité fut
définitivement franche.
Le site de Vindunum
C'est sur un site supposé vierge que l'administration romaine créa la capitale
de la civitas des Aulerques Cénomans. Son choix d'implantation s'explique par
différents facteurs : sa position centrale au sein de la peuplade, son site de
confluent qui le rattachait par la Sarthe, rivière navigable, à l'ensemble du
bassin ligérien et par le passage de plusieurs voies terrestres franchissant
par des gués ou des ponts cette rivière.
La vie à Vindunum
La vie matérielle
Aux alentours de la cité, de petits éleveurs et cultivateurs s'occupaient de
l'approvisionnement de celle-ci. Les habitants de Vindunum nous ont laissé des
traces de leurs préférences culinaires. On trouve tout d'abord des porcins
sauvages ou d'élevage, ensuite arrivent à égalité les bovins, les ovins, et les
volailles. Finalement, on trouve le cerf et le poisson.
Sur les marchés, on pouvait trouver du blé, du millet ou de l'orge, venant des
campagnes avoisinantes. On trouvait également de quoi s'habiller avec du lin ou du
chanvre tissé. Les ruraux locaux se servaient du jambon, de la laine et du fromage
comme monnaie d'échange, ce qui prouve bien que la romanisation n'a pas très bien
réussie dans la région.
On importait également des moules et des huîtres qui étaient proposées aux nobles de
la cité. Enfin, on pouvait s'approvisionner en outils, armes, vaisselle ou objets de
toilettes en provenance de tout l'empire.
La vie religieuse
Bien qu'à Allonnes, ait été construit un temple romain, les dieux celtes sont toujours
présents dans les esprits.
Seuls quelques irréductibles Romains vénèrent les idoles de Rome. En effet, on a retrouvé,
lors de travaux pour la construction de la place de la République, des puits qui sont
probablement des puits à offrandes aux dieux celtes. On y a retrouvé des céramiques,
des ossements d'animaux, des pièces de monnaies et des coquilles de fruits de mer. C'est
leur position les uns par rapport aux autres qui a permis de dater les offrandes et donc
d'en déduire les destinataires. Ce sont des puits qui permettent d'affirmer que la religion
romaine n'a eu aucune répercussion chez les humbles, de même que le mode de vie de Rome ne
s'est vu appliqué que chez les élites.
L'administration
Le Mans fait partie de la seconde Lyonnaise. En 385, la cité se rattache à la troisième
Lyonnaise qui a pour capitale Tours. Malheureusement, nous n'avons aucune documentation
sur l'administration pure et simple de la ville. Nous pouvons juste dire que Vindunum était
un "camp de repli" pour les troupes se trouvant sur les côtes et faisant face à
la piraterie.
L'étendue de la cité
On peut affirmer que la cité ne s'est pas repliée totalement derrière la muraille. En
effet, on a retrouvé de nombreuses céramiques sur la rive droite de la Sarthe qui nous
confirment la présence d'un faubourg. Mais ces céramiques laissent croire également que le
matériel romain a fini par triompher. Le temple de Mars Mullo à Allonnes nous permet également
de penser que la cité était entourée de faubourgs.
Bilan de la vie religieuse et matérielle
Bien que la cité ait l'apparence d'une cité romaine, elle n'en possède pas ou peu les bases.
En effet, les habitants n'ont jamais adopté la religion romaine et n'ont que très partiellement
adopté le mode de vie romain.
Les sites archéologiques
Introduction
L'état actuel de la recherche archéologique n'est pas assez avancé et ne permet
que la délimitation des différentes zones urbaines sans pouvoir en définir la densité
ou le dessin, encore moins l'évolution.
Sur la rive droite, le débouché des ponts ou des gués franchissant la Sarthe
formait les départs des voies se dirigeant vers la Normandie, Jublains et la Bretagne
vers Rennes. A cet endroit s'étendaient deux quartiers.
La rive gauche (le plateau du centre ville actuel, la butte du vieux Mans, le vallon
d'Isaac) était également occupée.
Le site de la cité judiciaire
Situé sur le rebord du plateau d'Isaac à l'avant de la Percée Centrale, l'espace de
la Cité Judiciaire a permis l'étude de l'occupation urbaine sur environ 2000 m².
Quatre phases chronologiques se succèdent pour la période romaine. Les trois premières
associent une voirie et des habitats qui évoluent jusqu'à l'abandon du quartier urbain.
La quatrième phase marquée par une fonction cimetériale prouve le repli de la ville au
Bas-Empire.
Durant la première moitié du premier siècle, une voie orientée nord-sud remonte de la
vallée d'Isaac pour atteindre le plateau. Plusieurs habitats disposés en ligne sont
édifiés à proximité de cette voie. Ces constructions comportent une architecture de
bois et de torchis. Les poteaux plantés dans le sol formaient l'ossature des murs.
Probablement dès la fin du troisième siècle, l'ensemble du site est occupé par une
petite nécropole qui fournit 17 sépultures.
La hauteur du Vieux Mans
Cette partie de la ville antique reste la moins bien connue du fait de la difficulté à
l'accès des terrains, à la densité de l'occupation bâtie de l'espace urbain et de la
destruction d'une grande partie du sous-sol archéologique par le creusement des caves
et des différents souterrains.
Un certain nombre d'observations effectuées en différents points de la vieille ville
confirme la permanence de l'occupation humaine durant le
Haut-Empire.
La disposition des immeubles reste inconnue au sein d'un quadrillage non prouvé.
Le bâti n'apparaît qu'à l'état de lambeaux disséminés sur un site dont la topographie
actuelle ne ressemble plus à celle du moment, du fait de la construction de l'enceinte au
Bas-Empire.
Un grand bâtiment sur lequel vient s'appuyer le mur de l'enceinte existe partiellement
sous la mairie. Des vestiges de murs et d'un hypocauste ont également été retrouvés.
La place du marché couvert
Les 1 500 m² fouillés sous cette place ont permis l'étude partielle d'un quartier urbain
situé dans l'élargissement de la vallée d'Isaac, à proximité de la Sarthe, à peu de
distance du présumé port antique.
L'occupation de ce quartier s'étale depuis le début de notre ère jusque dans le courant
du troisième siècle. Deux bâtiments de bois et torchis à poteaux plantés et au sol de
briques crues sont les témoins de la première moitié du premier siècle.
Un grand canal servant probablement de collecteur sur cette pente assurait l'assainissement
du quartier.
Au nord de ce collecteur, des sols cailloutis et deux hypocaustes superposés attestent de
la présence d'un bâti de qualité à caractère public ou privé.
Au sud du collecteur, deux voies perpendiculaires organisent un quartier en lots dont
l'organisation interne montre une grande domus et des installations plus diverses et moins
ordonnées comme des boutiques, des ateliers artisanaux et des fours.
L'axe du vallon d'Isaac
Ce vallon montre les traces d'occupation romaine depuis le fond des quinconces des jacobins
jusqu'à l'élargissement terminal. A diverses époques on a trouvé des céramiques et monnaies
romaines dans l'enclos des Jacobins. C'est sur le rebord oriental du vallon que s'élevait
l'amphithéâtre dont les vestiges mis à jour en 1792 auraient montré un monuments de forme
circulaire de 112,66 mètres de diamètre. Mais, un texte du IV° nomme ce monument Arenae,
les Arènes.
Les aqueducs
L'importance de l'occupation de la vieille ville s'affirme par la présence d'un aqueduc
desservant le site, retrouvé en deux points sur la crête du promontoire. Cette présence,
destinée soit à la simple nécessité du quartier ou du fait de sa position haute peut
correspondre à une fonction de répartition (château d'eau). La pente du vallon d'Isaac,
dont les thermes, en auraient tiré leur alimentation.
Deux aqueducs alimentaient la ville, traduisant ainsi les préoccupations et les besoins
publics ou privés symbolisant le nouveau mode de vie introduit par la civilisation gallo-romaine.
L'aqueduc des Fontenelles avait un tracé long de 3,5 km et celui d'Isaac un parcours de 1,5 km.
Ils couraient sur chacun des versants du promontoire selon des courbes de niveau différentes (70-72
mètres et 75-77 mètres). L'aqueduc des Fontenelles aboutissait sur la crête du vieux Mans et
monte alors un radier dont les dimensions internes sont de 35 cm de large sur 32 cm de hauteur.
Ses dimensions dans sa partie rurale sont plus importantes, laissant penser que des prises d'eau
ont dû se faire dans un parcours urbain.
L'aqueduc d'Isaac serpente sur la partie haute du vallon et se perd dans sa maçonnerie romaine sur
la terrasse de Tessé.
Cette alimentation en eau assurait en priorité les fontaines publiques et les monuments publics et
enfin les maisons de quelques particuliers autorisés à se brancher sur les aqueducs. Mais la
complexité de ces ouvrages ne saurait faire oublier des moyens plus simples pour se procurer de
l'eau : les sources naturelles en bordure de la Sarthe et du ruisseau d'Isaac.
Les thermes
Construits dans leur premier état au milieu du premier siècle, ces thermes vont connaître plusieurs
campagnes de construction. La restructuration totale du quartier voit leur implantation
s'effectuer sur la pente sud-est du vallon d'Isaac. Une succession de murs de soutènement disposés
parallèlement à l'axe du vallon permit l'établissement de grandes terrasses supportant les suites
des salles des thermes. On retrouve sous les terrasses les plus proches du vallon les niveaux
d'occupation du début de notre ère.
Fouillé en deux temps, du fait des possibilités d'accès au terrain, ce monument montre dans son état
terminal de fonctionnement trois alignements parallèles qui, avec les salles annexes, lui donnent
une largeur de plus de 36 mètres, sur une longueur inconnue du fait des limites du bâti moderne.
C'est tout un groupe de salles juxtaposées recouvrant parfois un ou deux niveaux plus anciens qui ont
été mis à jour.
Dans le premier alignement à partir de la rue des Fossés-Saint-Pierre, nous avons :
- une salle A, dont les niveaux supérieurs appartiennent à un état terminal froid réaménagé
sur le même cadre d'une première salle chaude ;
- une piscine froide B ;
- une cour C riche en matériel archéologique datant de la destruction du site.
Ces thermes furent totalement détruits à la fin du troisième siècle, suite au choix du tracé de
l'enceinte, située un peu plus haut sur la pente. Ils devinrent une carrière de pierres dont les
remblais ont scellé un mobilier se rapportant à la fin de la grande crise du III° Siècle.
Dans un deuxième alignement apparaît une grande salle de forme octogonale sur
hypocauste
au sol recouvert d'un pavement de mosaïque. Cette salle recouvre la plus grande partie de deux
salles appartenant à un état antérieur. L'une d'elle correspondait à un bassin froid.
Dans un troisième alignement se présentent une grande salle quadrangulaire sur hypocauste formant
probablement la plus grande salle du monument. Elle est bordée par deux petites salles annexes F et G.
Un grand mur terrasse termine le monument en surplomb de la vallée du ruisseau d'Isaac.
L'alignement des salles A et B correspond au
frigidarium.
Les salles F, G et la salle octogonale sont probablement des
tepidarium
(les praefurnium ou chaufferies extérieures n'ayant pas été retrouvées).
La décoration de ce monument nous apparaît à l'état de vestiges. Ce sont les fragments de deux mosaïques,
d'enduits peints, de stucs et de corniches. La mosaïque recouvrant le sol de la grande salle octogonale
est formées de tesselles de type « Pavimentum » tesselarum, petits cubes de pierre plus ou moins réguliers
de 2 cm² de surface. Elle se compose de motifs géométriques. La seconde mosaïque montre un triton.
Les sites archéologiques
L'enceinte gallo-romaine
Le tracé de l'enceinte de la ville des Cénomans ne délimitera qu'une superficie très réduite
de l'aire occupée par la ville du Haut-Empire,
sur sa bordure Nord-Ouest. Le choix du tracé englobant la pointe terminale du plateau de
Sargé ne paraît pas aujourd'hui excellent du point de vue stratégique, car il se
trouve dominé au nord-est par la hauteur du Mont Barbet.
Ce rempart dessine un quadrilatère irrégulier d'environ 450 mètres de long sur 250 mètres de
large, lui donnant un périmètre de 1 300 mètres qui détermine une surface de 9 hectares.
La construction du rempart a nécessité l'arasement d'une vaste superficie affectant le paysage
urbain, de façon à dégager toute la zone des abords et du tracé même des défenses. Le fait de
retrouver des éléments de grand module dans certaines parties du soubassement laisse supposer
que plusieurs des grands monuments publics pouvaient se situer, ou sur le tracé même, ou à son
avant (cas des thermes).
Les fouilles montrent la destruction, en plusieurs points situés à l'avant du rempart, de toutes
les constructions élevées au cours du Haut-Empire : thermes, habitats de la rue des Poules,
de la rue Dorée, de Saint-Benoît, de la rue de la porte Saint-Anne.
La construction de l'enceinte du Mans ne peut se dater en dehors de cette tranche chronologique
allant de la fin des années 270 jusqu'au début des années 300. La qualité et le soin pris pour
son élévation et son décor, l'importance même du chantier, ont demandé une longue durée que l'on
doit évaluer à une génération.
Le mur a été en grande partie préservé par sa double utilisation au cours des siècles. Il fut le
seul système défensif de la ville jusqu'au XIV° siècle, puis sa fonction de mur terrasse supportant
des constructions le rendit nécessaire en mains endroits. On suit encore son élévation sur de
longues parties malgré des revêtements de maçonneries médiévales ou modernes et son tracé reste
intact dans le sous-sol, sauf au débouché du haut du Tunnel.
On retrouve dans le mode de construction du rempart gallo-romain du Mans des éléments classiques de
ce type de monument du Bas-Empire :
soubassement, élévations, tours, portes et
poternes.
Son tracé suit les mouvements naturels du terrain sans que l'on décèle le moindre travail de
modification. Les tours délimitent souvent un changement de dénivellation, et servent à la fois
d'éléments de défense et de contrefort.
Le soubassement
Le rempart ne possède pas de véritables fondations. Un lit de moellons corrige les inégalités du
terrain et assure l'horizontalité de l'assise des blocs ou des dalles constituant la base du soubassement.
Dans l'angle sud-ouest, près de l'église Saint-Benoît, des pilotis de bois servent de fondation pour
assurer la stabilité dans un terrain gorgé d'eau.
Les élévations
Le mur même de l'enceinte s'élève en un double parement composé sur ses deux faces par une maçonnerie
en petit appareil à assises réglées, avec alternance de moellons assisés et de rangs de briques.
Les constructeurs ont joué sur la couleur des moellons pour créer une certaine polychromie dans le décor
purement géométrique : losanges, triangles, cercles pointés, chevrons et X. Le noyau central du mur
consiste en un blocage de rocailles, de briques noyées dans la chaux blanche, assurant au tout une très
grande dureté.
Les tours
Onze tours sont encore visibles sur les trente ou trente-cinq qui ont pu exister, dont dix sur la face
ouest où elles sont régulièrement disposées tous les trente-six mètres. Ces tours sont de formes
différentes. La plus répandue est la forme demi-circulaire. La forme la plus originale se voit sur la
tour des Pans-de-Gorron, tour hexagonale. Toutes ces tours sont pleines à l'exception de trois qui ont
une chambre basse.
Les portes et poternes
On ne connaît qu'une porte principale située dans l'angle de la rue des Fossés Saint-Pierre et de la
collégiale. Elle se compose de trois passages, le principal au centre encadré de deux passages piétons.
Un de ces passages se trouve actuellement obstrué. Il est possible qu'une porte ait existé à l'extrémité
nord du castrum sur la place du Cardinal Grente. Trois poternes sont actuellement visibles sur le flanc
ouest de l'enceinte. Deux autres poternes ont été retrouvées mais ne sont pas visibles pour le moment. Les
textes anciens attestes de la présence de plusieurs autres poternes à retrouver.
Les autres sites
Au nord de la cité, sur la partie haute, un retranchement de terre connus sous le nom de Mont Barbet
assurait la défense de la ville.
Il fut retrouvé en 1848, à l'intérieur de ce camp (lycée Montesquieu actuellement), un trésor composé de
trois vases renfermant quatorze mille monnaies consulaires ou impériales faisant remonter l'enfouissement
sous le régne de Tibère. Un si important trésor en ce lieu fait songer à une trésorerie militaire enfouie
lors du soulèvement des Gaules en 21.
Lors de travaux sur le pont Gambetta, en 1809, on a découvert le port, qui était composé de pilotis et de
gros blocs de pierres fixés par des crampons.
Conclusion
Vindunum, sous le Haut Empire, profite de la paix et de la prospérité générale, notamment grace
à sa position de carrefour. Petite capitale provinciale, il ne faut certes pas la
surestimer : peu peuplée, à demi champêtre, elle ne joue pas de rôle, mais est
une ville, une cité avec tout ce que comporte cette fonction : activité économique et
culturelle, cadre urbain, bourgeoisie. Mais, de même que la vie religieuse se transforme,
la vie municipale connaît une crise à la fin du II° siècle et au début du III°. Un
monde nouveau est en gestation.